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Le blog de Jean-Marie Allain

Et si l'on transformait nos déchets ménagers en bio-méthane ?

29 Mars 2013 , Rédigé par Jean-Marie Allain

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La France, au travers de divers engagements internationaux, a engagé la lutte contre le changement climatique et les gaz à effet de serre d’origine anthropique qui en sont la cause.

Après le Grenelle de l’environnement, voici venu le moment du débat sur la Transition énergétique et sur le développement des énergies renouvelables dont la part doit atteindre 23 % d’ici 2020 (dont 10 % dans les transports).

Une telle (r)évolution nécessite des technologies nouvelles à mettre en oeuvre, comme c’est le cas avec la méthanisation.

Le SRCAE lui-même (Schéma Régional Climat Air Energie) prescrit 1000 GW / an d’ici 2020.

Localement, nous sommes engagés, au travers du SCOT Sambre-Avesnois, dans un Plan Climat Territorial qui encourage la méthanisation sur notre territoire.

La visite du site de Sequedin ne peut donc que nous enrichir et nous amener à nous ré-interroger sur les différentes options possibles dans le cadre de ce type de projets.

Rappelons que le méthane (CH4) provient de la dégradation de déchets organiques et qu’une tonne de méthane équivaut en effet de serre à 21 tonnes de gaz carbonique (CO2).

C’est pourquoi le méthane est le deuxième gaz après le CO2 dans la lutte contre les GES dont il représente en France 10 %.

Les sources d’émissions de méthane dans le monde sont nombreuses et diverses : élevage avec la digestion et les déjections du bétail, marais, mines de charbon, décharges, fonte du permafrost (croutes du sol gelé) en Alaska et en Sibérie, réchauffement des océans…

En France, même si les rejets ont baissé suite à la fermeture des mines, au captage du grisou ou au captage du bio-gaz dans certaines décharges, la lutte contre les émissions de méthane reste un enjeu crucial et appelle des solutions en amont (modification de l’alimentation du bétail par exemple) ou en aval avec la valorisation du méthane en énergie renouvelable, soit sous forme de bio-gaz (épuration partielle) avec production d’électricité ou de chaleur, soit sous forme de bio-méthane (bio-gaz éliminé de ses impuretés) pour produire du carburant ou être injecté dans le réseau de gaz naturel GRDF, comme cela se fait à Sequedin, sous l’égide de la Communauté Urbaine de Lille.

Pierre Mauroy, alors maire de Lille, avait rêvé qu’un jour les bus rouleraient avec l’énergie provenant des ordures ménagères.

Le rêve est devenu réalité, et en même temps la première expérience pilote en Europe.

La démarche ne consiste pas à faire un copié/collé de ce qui passe dans la métropole mais de s’en inspirer en prenant en compte la spécificité des territoires.

L’ objectif partagé, c’est la production de bio-méthane dans la mesure où la récupération de bio-gaz étant appelée à se développer de même que la demande d’une énergie renouvelable de qualité, l’injection dans le réseau GRDF, outre qu’elle semble financièrement plus intéressante par le prix de rachat négociable avec les fournisseurs (en cas d’absence d’acheteur, c’est GDF fournisseur qui est obligé de racheter),permet d’éviter le problème du stockage et assure une plus grande autonomie en termes de distribution (le bio-méthane circulant dans le réseau de gaz naturel et pouvant donc quitter le site de production).

La présence d’une voie d’eau est également un point commun intéressant si l’on en juge par le mode de transport fluvial des déchets sur la métropole : les péniches emmènent à l’incinérateur d’Halluin les déchets non putrescibles et ramènent vers Sequedin les déchets fermentescibles.

La nature des volumes de déchets à traiter n’est par contre pas identique.

Sur les 108 000 tonnes de déchets qui arrivent chaque année à Sequedin, ce sont les déchets verts qui occupent la première place (52 000 t), puis les déchets ménagers fermentescibles (46 500 t), ensuite les déchets provenant des marchés (6500 t), enfin les déchets de la restauration scolaire (3000 t).

La densité urbaine de la métropole explique cette part prépondérante des déchets d’origine domestique.

D’autres déchets fermentescibles provenant par exemple des surfaces commerciales peuvent ponctuellement compléter ces apports.

Les boues de station d’épuration ne sont pas admises à ce jour mais, préalablement séchées, pourraient bientôt pourvoir recevoir leur droit d’entrée.

En Sambre-Avesnois, c’est différent : la question des déchets agricoles occupe une place importante (l’agriculture représente 18 % des GES localement, même si l’élevage compense partiellement ces émissions par ses puits de carbone que sont les prairies et les haies) et la question des boues de station est également posée.

De son côté, le gisement des déchets ménagers n’a pas été à ce jour pris en compte mais pourrait néanmoins représenter un potentiel non négligeable (80 000 tonnes / an), en particulier sur la Sambre, plus dense en termes d’habitat (35 000 tonnes)

Cela aurait bien entendu des incidences à deux niveaux :

D’abord sur le mode collecte qui nécessiterait de changer les bacs domestiques en distinguant les déchets fermentescibles et les autres (et non plus les ménagers /verre / papier-plastique).

Ensuite, sur l’actuel centre de valorisation énergétique (incinérateur) dont il conviendrait alors de revoir à la baisse la capacité d’accueil, non sans que cela pose un problème technique (un incinérateur fonctionne correctement s’il tourne à plein régime !).

Au final, je retiens  de cette visite qu’il y a place en avesnois pour une offre de méthanisation adaptée à la singularité de notre territoire dont la partie rurale pourrait développer des unités de production de bio - gaz (la méthanisation à la ferme) et la partie urbaine une unité de production de bio-méthane alimentée par les déchets verts de l’agglomération (3500 tonnes), les déchets agricoles des exploitants proches du site, les déchets de la restauration collective.

Reste posée la question des déchets ménagers fermentescibles (35 000 tonnes sur le territoire sambrien), gisement appréciable dont il serait dommage de se priver pour rentabiliser une installation de méthanisation puisque chaque tonne soustraite à l’incinérateur permet de faire une économie de 79 euros.

Mais sujet sensible puisqu’il pose la question du maintien à terme de l’incinérateur dans sa forme actuelle ou plutôt dans son volume actuel.

Il n’empêche, si l’on tient compte de  l’économie réalisée par le volume de déchets soustraits à l’incinération et la revente de bio – méthane à GRDF (4 millions de m3 par an à Sequedin), l’installation, déjà séduisante sur le plan environnemental, prend tout son sens d’un point de vue économique.

La localisation idéale, si l’on s’appuie sur l’expérience lilloise, consisterait à identifier un site proche du bord à canal, proche du centre de tri, proche du réseau de gaz naturel (pour diminuer le coût du raccordement) et assez éloigné de l’habitat pour prévenir tout problème de nuisance olfactive (mais la visite du site a permis de constater que les nuisances, à ce niveau, étaient minimes).

L’essentiel, est bien de montrer que notre territoire est capable de se donner les moyens pour aller vers son autonomie énergétique et, par la même occasion, de créer de nouvelles synergies entre les acteurs (GRDF, collectivités locales, fournisseurs d’énergie…).

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