Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Jean-Marie Allain

Pourquoi l'Agglo ne taxe pas les logements vacants

13 Avril 2023 , Rédigé par Jean-Marie Allain

La proposition de l’Agglomération de voter la Taxe d’Habitation sur les Résidences Secondaires et autres locaux meublés non affectés à l’Habitation Principale

ignore la possibilité donnée à l’intercommunalité, par l’article 1407 bis du CGI, d’assujettir à cette taxe d’habitation les logements vacants depuis plus de 2 ans, pour peu que cette intercommunalité ait délibéré pour instaurer cette THLV créée en 2006, d’abord pour les communes par la loi Engagement National pour le Logement et étendue depuis 2012 aux EPCI disposant d’un PLH.

La délibération présentée exclue donc de la TH les 1900 logements vacants chroniques.

Or, cela est bien dommage pour deux raisons :

Tout d’abord, cela permettrait de faire rentrer annuellement dans la cagnotte une enveloppe d’environ 250 000 €.

Soit depuis 2012, un manque à gagner pour l’agglomération de plus de 2 millions d’euros.

Mais cela permettrait également de mettre notre politique fiscale en cohérence avec le contexte réglementaire :

En effet, Le Zéro Artificialisation Nette nous impose de recentrer le développement sur le tissu urbanisé, notamment sur le parc ancien, et la THLV est l’un des outils mis à notre disposition qu’il est regrettable d’ignorer.

Lire la suite

Les friches industrielles : retour vers le futur

4 Avril 2023 , Rédigé par Jean-Marie Allain

Note rédigée dans le cadre du séminaire organisé par « Vallée d‘Avenir », sous l’égide de Nathalie RENARD  (table-ronde consacrée à la revalorisation des friches industrielles).

Le Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la Sambre, publié en 1973, inscrivait dans ses objectifs la création de la Zone d’Activité Economique (ZAE) de Grévaux les Guides et la création d’un port fluvial, soit deux objectifs pouvant laisser penser que le développement de nouvelles zones d’activités économiques sur les plateaux d’entrée d’agglomération pouvaient être complémentaires à un maintien de l’activité industrielle en fond de vallée.

La crise sidérurgique qui va éclater au même moment va rajouter une nouvelle problématique aux politiques locales d’aménagement, celle des friches industrielles dont la reconquête va connaître plusieurs phases et plusieurs cas de figure.

LA PHASE DE RECONQUETE EN l’ABSENCE D’INTIATIVE PRIVEE ET D’INITIATIVE DES ORGANISMES PUBLICS

La première friche qui s’affiche en plein coeur du paysage sambrien est la friche d’Usinor Louvroil et ses 57 hectares de masses de béton et de ferrailles qui donnent l’image d’un véritable bombardement.

De 1975 à 1981, le maire pionnier de Louvroil André BOCQUET, ancien syndicaliste de la sidérurgie, se retrouve seul mais décide avec le directeur de l’Agence d’urbanisme, Jean Gobron, et son architecte Didier Darnaud, de prendre les choses en mains.
Jean Gobron travaille sur le projet de nettoyage du site et tente de trouver des financements auprès des administrations qui n’ont rien prévu pour ce type d’actions tandis que D.Garnaud conçoit, en lien avec le maire et le Président de l’Agence Jean Jouannot, un schéma de reconversion du site dans lequel il est prévu un port fluvial adossé à un lotissement industriel, lequel jouxte un lotissement artisanal et même un petit secteur dévolu à l’habitat (voir schéma de Didier Garnaud dans la revue « Urbanisme »).

A force de pugnacité, de pouvoir de persuasion et de négociation, la petite équipe parvient à obtenir auprès de l’Etat et de la Région, les aides nécessaires à la démolition et la remise en état du site. La plupart des gravats seront enfouis sur place.

En 1981, Pierre Mauroy, le Président de Région devenu premier ministre, vient inaugurer le site et s’appuiera sur cette expérimentation pour créer l’Etablissement Public Foncier de la Région Nord-Pas de Calais.

Faute de portage politique pour le volet aménagement, le projet de reconversion économique du site restera lettre morte…et le centre aquatique l’Emeraude de l’Agglomération y sera implanté un peu avant 2020.

LA PHASE DE PARTAGE DES ROLES ENTRE LE PRIVE ET LE PUBLIC

1977 : Fermeture d’HK Porter Marpent (1500 salariés et une vingtaine d’ hectares de friches sur Marpent et Boussois) :

  • Un industriel marpentois rachète les bâtiments de la rive droite pour les louer avant d’en revendre en 1999 une grande partie à ses locataires. Ce site, la zone de la Buissière, est toujours occupé aujourd’hui : fabricant d’isolants, chaudronnerie, stockage de produits import-export, découpage laser, activités artisanales diverses : on compte une dizaine d’entreprises.

  • Une autre société (SERTIRU) rachète l’aciérie, située la rive gauche, pour ferrailler les bâtiments industriels mais sans procéder à une remise en état du site.

2001 : la municipalité rachète sur ce site une partie du foncier qu’elle cède à l’agglomération et sollicite cette dernière pour faire l’acquisition du reste en vue de demander à l’EPF une requalification environnementale. L’opération, d’un montant d’1,2 M€ est financée intégralement par l’Europe, la Région et l’Etat. Ce secteur devient le 1er site d’intérêt communautaire au titre de la Trame Verte et Bleue, suivi immédiatement et dans les mêmes conditions par l’opération de requalification de la friche EDF de Pont-sur-Sambre.

On constate que le privé s’est limité au volet rentable de l’opération.

CAS DE RECONVERSION INTEGRALE DE LA FRICHE PAR LE PRIVE

Reconversion  de la friche Vallourec par la Société Flamme  .Il s’étendait sur 3 communes : Vallourec Maubeuge (devenue la céramique Desvres), Vallourec Louvroil (devenue Flamme Environnement) et Vallourec Hautmont, devenue le centre de tri Recyclage Des Vallées.

Sur deux décennies, remarquable métamorphose d’une immense friche (« le triangle noir ») en plein coeur de vallée.

Exemple de la friche de la fonderie Fontaine (7 ha sur Marpent et Jeumont)

Friche en sommeil depuis deux décennies.

2003, le maire de Marpent demande avec insistance au liquidateur d’accélérer la mise en vente du bien. Un ferrailleur rachète la friche aux enchères assure la remise à niveau et revend à Bouygues Immobilier qui conçoit, en concertation avec les deux communes, un projet autour d’un EHPAD et d’une soixantaine de logements revendus en VEFA à un bailleur social, Partenord Habitat.

Opération exemplaire d’urbanisme avec une artificialisation zéro.

CAS DE RECONVERSION INTEGRALE DE LA FRICHE PAR LE PUBLIC

C’est le cas de figure le plus fréquent 

  • Outre l’Emeraude à Louvroil,

  • Reconversion de la friche Titan Coder à Maubeuge (EPF-REGION Lycée Lurçat)

  • Le Port Fluvial d’Hautmont (reconversion communale)

  • Reconversion de la friche d’armement aulnésienne  en pôle des Cultures Actuelles  (Agglomération)

LES RAISONS DE LA RARETE DES RECONVERSIONS A VOCATION INDUSTRIELLE

-Les raisons techniques : entreprises moins tributaires de la voie d’eau pour le transport (même si certaines peuvent être très tributaires en termes d’approvisionnement (exemple du projet franco coréen de séparateurs de batteries qui exigeait au moins 40 hectares et un volume d’eau considérable) + besoin pour les entreprises de disposer de visibilité commerciale (Ménissez), d’accessibilité routière (zones de Grévaux, de La Marlière.. ) d’espaces non contraints par le tissu urbain (nuisances, possibilité de s’agrandir), facilités à s’installer sur des sites tout équipés par la collectivité.

-Les raisons juridiques : La loi NOTRE de 2015 (nouvelle Organisation Territoriale de la République) limite les intercommunalités à la création de zones d’activités économiques aux zones qui étaient à l’origine publique, ce qui leur interdit, a contrario, de transformer une ancienne ZAE privée (avec des bâtiments vacants en friche)  en ZAE publique (ce qui a été fait avec la ZAE de Fives - Cail à Rousies n’est plus possible).L’Etat, indirectement, a favorisé l’artificialisation des sols à la périphérie.

-Les raisons financières : Effets des subventions, plus intéressantes en cas de renaturation : il faudrait pourtant faire  le bilan de la renaturation. Si certains choix ont été pertinents, la renaturation génère des coûts d’entretien très conséquents pour la collectivité et des espaces d’incivilités.

-Les raisons culturelles : les reconversions à but industriel sont parfois techniquement possibles mais culturellement impensables : les collectivités ont pris des habitudes…écartant tout risque de réaction négative des populations… la friche de la cartonnerie de Jeumont n’est pas encore requalifiée qu’on parle déjà de renaturation et de zones de promenades (alors qu’il en existe déjà plusieurs dizaines d’hectares à quelques mètres et que cette friche est équipée de plusieurs quais sur la Sambre !).

-Absence d’une réflexion globale sur l’existence et le devenir des friches : de 1980 à 2000, il existait à l’Agence d’Urbanisme un Observatoire permanent des friches industrielles avec un chargé de mission à temps plein. Ensuite, plus rien. Résultat : des opérations au coup par coup en dehors de toute planification. L’idée d’un schéma intercommunal des Friches en est à ses balbutiements, 40 ans après l’apparition des premières friches !

VERS UNE REMISE EN QUESTION DU MODELE QUI PREVAUT AUJOURD’HUI

Le Zéro Artificialisation Nette va s’imposer à l’habitat mais aussi aux entreprises et va contraindre à revoir aussi bien les logiques de transport (probable regain du fret ferroviaire, sachant que certaines friches disposent d’embranchements) que le modèle de la zone industrielle périphérique.

Les exigences de la transition écologique vont par ailleurs accroître l’acceptabilité  des entreprises dans les communes.

Le devenir de la friche Sambre et Meuse représente à cet égard un enjeu de première importance.

Lire la suite

LA LUTTE CONTRE LES LOGEMENTS VIDES : un exemple, parmi d’autres,  de la dépossession  des communes de leur pouvoir d’agir.

1 Avril 2023 , Rédigé par Jean-Marie Allain

Les invitations plus ou moins coercitives des  pouvoirs publics à limiter l’étalement urbain, si elles peuvent se comprendre à l’aune du réchauffement climatique et de la nécessaire protection de la bio-diversité, impose aux communes de recentrer leur développement sur le tissu urbain , notamment la reconversion des friches, qu’elles soient industrielles, agricoles ou constituées d’un habitat vacant chronique et dégradé.

C’est ce dernier point que je souhaite aborder ici dans la mesure où les outils dont disposent les commune s’avèrent insuffisants ou en contradiction avec la finalité du renouvellement urbain.

Ainsi en va-t-il de la Taxe d’Habitation sur les Logements Vacants (THLV).

A l’heure où les pouvoirs publics se gargarisent de la lutte contre l’artificialisation des sols, cette taxe, relativement facile à décréter puisqu’une simple délibération suffit, revêt la plus grande importance  puisqu’elle vise à inciter les propriétaires de logements vides à mettre leur logement sur le marché.

La Taxe d'Habitation sur les Logements Vacants (THLV) a été instaurée en France en 2006 par la loi portant engagement national pour le logement  et appliquée pour la première fois en 2007.

Elle est codifiée à l'article 1407 bis du Code Général des Impôts :

Les communes peuvent « assujettir à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l'habitation principale, pour la part communale et celle revenant aux établissements publics de coopération intercommunale sans fiscalité propre, les logements vacants depuis plus de deux années au 1er janvier de l'année d'imposition ».

Malheureusement, le Ministère des finances ne semble pas encore en avoir pris conscience de son intérêt puisqu’il  la relègue à une place mineure dans ses textes, à commencer par le Code des Impôts et son article fondateur.

Il eût été tellement plus simple d’écrire que les communes  peuvent « assujettir à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l'habitation principale, les logements vacants depuis plus de deux années au 1er janvier de l'année d'imposition,  pour la part communale et celle revenant aux établissements publics de coopération intercommunale sans fiscalité propre».

Cette petite anomalie, on va le voir, provoque un effet en cascades grave  puisqu’elle aboutit à ce que la taxe soit carrément réduite à un sous-entendu, c’est-à-dire non mentionnée  dans d’autre articles du même code.

Ainsi, l’ article 1636 B sexies I, relatif aux liens entre les taux est révélateur.

« Les conseils municipaux et les instances délibérantes des organismes de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre votent chaque année les taux des taxes foncières, de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et autres locaux meublés non affectés à l'habitation principale et de la cotisation foncière des entreprises ».

La Taxe d’Habitation sur les Logements Vacants est passée aux oubliettes alors qu’elle est bel et bien concernée par cet article.

Et cet oubli se reproduit ensuite dans les messages émanant du Ministère des Finances et envoyés aux Préfectures qui ventilent vers les sous-préfectures, lesquelles transmettent enfin aux communes.

A titre d’exemple, ce texte reçu le 24 mars de la Préfecture du Nord, via la sous-préfecture : « A compter de 2023, la taxe d’habitation est renommée « taxe d’habitation des résidences secondaires et autres locaux vacants meublés et non affectés à l’habitation principale », demandant aux communes de ne pas oublier de voter le taux de THRS… mais pas celui de la THLV là où celle-ci a été instaurée !

Une telle omission, ajoutée l’article 1636 B sexies I, a amené un certain nombre de communes ayant instauré la THLV à majorer celle-ci, parfois fortement dans le cadre de la lutte contre la vacance. Or, une telle majoration n’est en réalité pas possible dans la mesure où la règle du lien entre les taux, fixée par l’article 1636, limite cette possibilité bien que, étonnamment, il n’y soit pas question des logements vacants mais bien des « résidences secondaires et autres locaux vacants meublés et non affectés à l’habitation principale ». 

On voit qu’une imperfection sur une simple formulation peut avoir des conséquences fâcheuses.
Mais la forme, comme toujours, nous parle aussi du fond.

En effet, non seulement la règle du lien entre les taux (art 1636 B) oblige la commune qui a mis en place cette taxe et qui souhaiterait l’augmenter, à le faire dans la même proportion que la part communale du foncier bâti et du foncier non bâti, mais a contrario, lorsqu’une commune a fait le choix de baisser le foncier bâti, elle est tenue de baisser dans les mêmes proportions la taxe sur les logements vacants !

Cette règle du lien entre les taux n’a, dans ce cas de figure précis, aucun fondement particulier et se révèle contraire aux finalités des politiques publiques.

La lutte contre l’artificialisation n’a de chances de progresser que si l’on donne aux communes les outils d’intervention à la hauteur des enjeux.

La THLV est l’un de ces outils mais qui demande en ce sens à évoluer.
L’un des premières mesures consisterait à ce que l’article 1636 B sexies du Code des Impôts distingue clairement la THRS et la THLV et rende possible la dérogation à la règle du lien entre les taux pour cette dernière.

Une autre avancée pourrait consister à ce que les logements classés insalubres ne soient pas exonérés comme actuellement de la THLV car une telle exonération pénalise les communes dans la lutte contre l’insalubrité dans la mesure où elles se retrouvent, après relogement des familles, avec de nouveaux logements vides.

En l’état actuel des choses, et après la suppression de la Taxe d’Habitation, les élus ont le sentiment d’être une nouvelle fois dépossédés de la maîtrise de ces enjeux pour reprendre le concept du géographe Christophe Guilluy et comme lui, nous en appelons au pragmatisme dans le seul but de servir les intérêts de la population et des territoires qu’elle habite.

Lire la suite