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Le blog de Jean-Marie Allain

Prendre la main...sans tordre le poignet

29 Novembre 2012 , Rédigé par Jean-Marie Allain Publié dans #AGGLO INTERCOMMUNALITE

La proposition de l’Etat d’élargir les périmètres intercommunaux pose deux problèmes.

Le premier, c’est le postulat de départ

Le second, c’est la méthode utilisée.

LE POSTULAT DE DEPART

Raisonnement de l’Etat : plus on augmente la taille des intercommunalités, plus on plus mutualise, plus on gagne en cohérence dans les politiques publiques locales, et plus on économise l’argent public

Remarque : C’est un postulat, pas une démonstration.

D’ailleurs, le même postulat peut-être formulé à l’envers

Ainsi, un ancien ministre de Michel Rocard (Brice Lalonde) écrivait en mars 1981 dans un ouvrage collectif intitulé «  le pouvoir de vivre » : « les avantages des grandes unités sont souvent illusoires. Il est faux que ce soit le plus grand qui soit le plus efficace »

Si en effet la mutualisation est incontournable pour des missions stratégiques (aménagement du territoire) ou techniquement très lourdes (collecte et traitement des déchets), l’expérience prouve que beaucoup d’autres missions, ce n’est pas toujours le cas.

Voici 4 exemples.

- Lorsque trois petites communes ont un seul cantonnier qui travaille sous l’autorité directe d’un maire ou d’un adjoint aux travaux, et qu’on regroupe ces trois cantonniers, ils ont besoin d’un chef de travaux. Au final, ça coûte plus cher.

- Lorsqu’une petite commune veut négocier un prêt de 200 000 euros pour faire un aménagement, elle l’obtient rapidement auprès des banques alors qu’agrégé à l’échelle de dizaines de communes, le montant sera de plusieurs millions d’euros, rendant le prêt beaucoup plus hypothétique et contraignant la petite commune à différer ses travaux à une échéance incertaine

- L’extension  des périmètres d’intercommunalité éloigne les citoyens des lieux de décision et pose un véritable problème démocratique, même s’il n’est pas insoluble.

- L’élargissement des périmètres  amène inévitablement une demande légitime d’égalité de services sur tout le territoire intercommunal, et donc des dépenses supplémentaires que la dotation de l’Etat risque d’être insuffisante pour compenser.

D’ailleurs, si c’était aussi évident, pourquoi l’Etat agiterait-il la carotte financière de la dotation majorée ? Même si carotte s’est transformée en petit pois dans le projet de loi de finances 2013, et insoutenable dans la perspective des 300 fusions à venir pour lequel le projet de loi ne garantit même plus la garantie du maintien à 100 % de la dotation.

Pour terminer sur ce premier point, ajoutons que la logique en œuvre dans le schéma départemental tend au gigantisme et a été approuvée par une Commission Départementale où les maires sont minoritaires.
Or, nos électeurs ne nous pas donné un mandat pour diluer nos communes dans un ensemble plus vaste.

LA METHODE UTILISEE

L’Etat a fait le choix de la marche forcée vers de plus grandes intercommunalités.

Or, dans ce débat sur la coopération intercommunale, on oublie trop souvent le premier terme, celui de coopération dont il n’est pas inutile de rappeler l’un des principes fondamentaux de l’Adhésion volontaire et ouverte que l’on retrouve, soit dit en passant chez Owen, Fourier ou encore Proudhon.

A vrai dire, au centre de ce débat est posée la question philosophique de la liberté.

Si l’on admet, comme Rousseau, que la liberté est un droit non aliénable et imprescriptible, on en tire les conséquences.

De même qu’un individu n’a pas à aliéner sa liberté (comme c’était le  cas des mariages forcés autrefois dans les milieux aristocratiques et comme cela existe encore aujourd’hui dans certaines parties du monde, fut-ce au nom de l’intérêt général de la fratrie), de même une assemblée démocratiquement élue  n’a aucunement  l’obligation  d’aliéner sa souveraineté, fut-ce au nom de l’intérêt général en dehors d’un pacte ou d’un contrat social dans lequel chaque partie serait consentante et aurait négocié ses droits et ses devoirs.

De cette conception qui a nourri la philosophie des Lumières et les fondements de notre République découlent le principe de la libre administration des communes et celui de l’intercommunalité volontaire et choisie et, corrélativement, du refus du regroupement autoritaire.

En Val de Sambre, il est évident que la division de l’agglomération est un handicap, et qu’il serait préférable que la CCSA à terme nous rejoigne, mais les élus qui n’ont pas souhaité le faire à ce jour, parce qu’ils démocratiquement élus, ont le droit de ne pas le vouloir.

La liberté, disait Rousseau, n’est pas de faire ce que l’on veut mais de ne pas être obligé de faire ce que l’on ne veut pas.

D’autant plus que la situation est telle aujourd’hui qu’imposer un mariage forcé peut aboutir à paralyser l’intercommunalité.

Il est difficile de comprendre que l’Etat impose à la CCSA de fusionner avec l’AMVS alors qu’elle s’y oppose tandis que dans le même temps, il interdit à La Longueville et à trois autres communes du Bavaisis de rejoindre l’AMVS alors qu’elles en ont exprimé le souhait et qu’elles appartiennent (pour trois d’entre elles) au bassin d’emploi de Maubeuge.

Les collègues qui comprennent la fusion autoritaire me disent qu’on ne travaille pas pour les élus mais pour l’avenir du territoire.
C’est exactement ce que disant les parents de jeunes forcés de se marier : ce n’est pas pour eux mais pour l’avenir de la famille et de son patrimoine.

Il n’y a par contre,  dans la proposition qu’a prise le conseil municipal de Marpent, aucune obstruction à ce que nous rejoignent les intercommunalités volontaires, même si nous savons que cet élargissement, dans le contexte budgétaire actuel, aura des incidences financières lourdes en termes de services que ces communes sont en droit d’attendre,

Il y a par contre un refus de contraindre une intercommunalité à un mariage forcé et à se plier finalement à une règle qui oublie les principes fondamentaux de la coopération intercommunale, basée sur l’adhésion volontaire et librement consentie.

Continuons de tendre la main à la CCSA sans pour autant lui tordre le poignet.

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