Station mairie (inauguration du Passage de la Place)
Nos pensées vont aujourd’hui vers nos amis ukrainiens qui se battent contre la guerre dont nous ne pensions pas que le visage hideux aurait pu réapparaître en Europe, nous laissant pour unique espérance qu’elle s’achève le plus rapidement possible.
En ce Printemps des poètes qui commence, consacré justement cette année à l'Ephémère, le thème de la fugacité, du passage est pleinement d’actualité.
Un « passage » désignait au Moyen Age un chemin étroit ou un défilé montagneux avant de signifier au XIXe siècle une petite rue, généralement couverte, interdite aux véhicules.
Curieusement, dans le vocabulaire ferroviaire, le terme de passage souterrain fait son apparition en 1824 alors que celui de passage à niveau date de 1868.
J’ai toujours trouvé qu’il y avait quelque chose d’insolite dans ce lieu intermodal où se croisent sans se voir les passagers du TER et les passants qui se rendent à pied au centre bourg ou qui en reviennent.
Le passage souterrain fut inauguré en 1959, après moult prises de position du conseil municipal qui ne voulait pas de la passerelle proposée par la compagnie des Chemins de fer du Nord.
Ce passage se substituait au passage à niveau qui séparait le haut et le bas de la rue de la place et dont la trentaine de commerces (dont trois magasins de cycles) suscitait une effervescence commerciale, image qui peut paraître surprenante aujourd’hui mais encore apte à servir de tremplin à une compréhensible nostalgie.
La suppression du passage à niveau, couplé avec le développement de l’automobile et des zones commerciales, a scellé en une décennie le sort de cette rue et de ce quartier, aujourd’hui le plus précaire de la commune.
Depuis de nombreuses années, ce passage était devenu le point noir de Marpent en termes d’images et de sentiment d’insécurité.
Pourtant, cette liaison piétonne singulière est très utilisée par les parents qui habitent dans le vieux-bourg et sur la rive gauche de la Sambre mais sans moyen de locomotion, pour venir en mairie, faire leurs courses ou accompagner leurs enfants au groupe scolaire ou aux activités de loisirs comme la médiathèque, l’école de musique ou le centre de loisirs.
Et, pour tout dire, je ressens presque comme un acte de repentance que d’avoir œuvrer si tardivement à donner à cette liaison sa nouvelle physionomie.
Le passage nous était si familier que nous en avions oublié sa laideur.
Albert Camus, dans la préface de son petit livre « l’envers et l’endroit », livre une réflexion qui éclaire notre démarche :
« On trouve dans le monde beaucoup d’injustices – écrit –il – mais il en est une dont on ne parle jamais, qui est celle du climat. Lorsque la pauvreté se conjugue avec cette vie sans ciel, ni espoir, qu’en arrivant à l’âge d’homme j’ai découverte dans les horribles faubourgs de nos villes, alors l’injustice dernière, et la plus révoltante, est consommée : il faut tout faire, en effet, pour que ces hommes échappent à la double humiliation de la misère et de la laideur ».
C’est le sens de ce projet, caractéristique de par sa luminosité, son esthétisme et les garanties de sécurité, qui a consisté à transformer ce sordide « passage souterrain » en « passage de la place », en lui donnant toutes les apparences d’une bouche de métro, conçue dans l’esprit « art nouveau » du concepteur du métro parisien, Hector Guimard.
La municipalité a souhaité en effet, par delà cette opération originale et d’un coût tout-à-fait raisonnable, conforter la requalification du centre-bourg, engagée depuis dix ans : rénovation de la mairie, du groupe scolaire, création de la médiathèque, création d’un cabinet de téléconsultation médicale, d’un cabinet paramédical, d’un cabinet infirmier, création d’un local commercial, création de la ruche qui accueille micro entreprises, sécurisation des abords de l’école, création d’une boulangerie qui ouvrira début mai.
Le projet ambitionnait de provoquer une véritable mutation de ce lieu sinistre pour en faire un espace accueillant, respectueux de ses habitants et garantissant à ces derniers des conditions de confort et de sécurité qu’ils sont en droit d’attendre d’un lieu public.
La transformation d’un tunnel sinistre où le piéton marchait au pas de course en un passage agréable et lumineux n’est pas un projet grandiose mais une action incontestablement utile, avec même un potentiel de développement culturel comme le montre le métro parisien, où l’art souterrain a déjà démontré qu’il pouvait joindre l’agréable à l’utile.
En témoigne le livre que vient d’écrire, en collaboration avec la RATP, Mme PIEGAT, critique d’art, relatant ses plus belles immersions dans le métro parisien, comme celle de la station Concorde, tapissée en 1989 de 49 000 carreaux reproduisant les 49 000 lettres de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Je pense donc qu’on peut encore l’agrémenter de différentes manières : une fresque d’ambiance extérieure sur les plaques béton qui séparent de la voie ferrée, des emplacements réservés à des expositions picturales, et pourquoi pas une ambiance musicale, bref à y permettre la flânerie, chère à Walter Benjamin dans son travail sur Paris au début du XXe siècle, hautement prémonitoire puisqu’il s’intitule… « le livre des Passages » !
Les entreprises locales sélectionnées ont remarquablement tenu leurs engagements en termes de coût et de qualité de prestations : DUFOSSEZ pour le gros œuvre, PARTNER ELEC pour l’électricité, SPHERE pour le revêtement et la peinture, FERRONNERIE AVESNOISE pour la métallerie.
Qu’il nous soit donc permis de remercier aujourd’hui le concepteur, Pascal Delplanche, notre collègue conseiller délégué aux projets et ancien collaborateur d’architecte, les financeurs, et trois artistes bénévoles de l’AMLC, Marie-Claire Dubois, Michel Casset et Gérard Lavigne pour les lettrages sur céramique.
Sans oublier le service assainissement de l’Agglomération qui nous accompagne pour réguler l’écoulement des eaux de ruissellement en ce point bas de la commune et nos agents techniques, qui ont en charge la propreté de ce lieu.
Sur un budget total HT de 91 184, 18 €, l’Etat, via la DETR, nous a aidés à hauteur de 27 355, 25 € (30%), le Conseil Régional, au titre du Fresat (Fonds Spécial de Relance Et de Solidarité Avec les Territoires), pour un montant identique (30 %), et le Fonds de concours de la Communauté d’Agglomération à hauteur de 18 236,84 € (20 %), soit une part à charge pour la commune de 18 237, 09 €
Aux services de l’Etat, aux conseillers régionaux et aux conseillers communautaires, nous exprimons notre gratitude et leur assurons que ce soutien est un encouragement pour notre équipe à continuer d’œuvrer à la requalification du centre-bourg.