~ DECHETS VERTS : UNE CHARGE OU UNE RENTE ?
~ A la première lecture, on peut trouver concevable, d’un strict point de vue économique, la réponse proposée au problème posé par le coût du ramassage. Par contre, sur le plan environnemental et sanitaire, c’est catastrophique.
Outre le fait que le compostage individuel suggéré émet autant de gaz à effet de serre que le compostage collectif, il ne règle pas la question de l’élimination des branchages pour les personnes qui n’ont pas les moyens de se rendre aux déchetteries. Celles-ci seront contraintes de braver l’interdiction du brûlage des déchets verts, source d’émission importante de dioxine.
J’aurais souhaité pour ma part que le débat s’inscrive dans un projet plus global intégrant sur le plus long terme des choix politiques, davantage conformes au développement durable : je veux parler de la méthanisation.
Déjà, en son temps, Pierre Mauroy, en homme politique visionnaire, avait su impulser sur la métropole une politique moderne de collecte et de valorisation des déchets. Après Amiens, Montpellier, Calais, les habitants de la Métropole lilloise, ont été invités depuis 2008 à regrouper leurs bio-déchets qui sont emmenés au Centre de Valorisation Energétique de Sequedin (que certains élus ont visité avec moi) où ils seront transformés en bio-gaz et revendus à un opérateur gazier via le réseau de gaz ERDF.
Les avantages de la méthanisation sur le compostage : c’est la réduction de la production de gaz à effet de serre par substitution de l’énergie biogaz à l’utilisation de combustibles fossiles, c’est un bilan énergétique positif, et surtout, sur le plan écologique et sanitaire, l’absence de rejets atmosphériques (alors que le compostage, qu’il soit individuel ou collectif, libère de grandes quantités de méthane, gaz dont le pouvoir réchauffant est 20 fois plus élevé que celui du CO2 et qui représente actuellement 40 % des émissions de gaz à effet de serre), Le compostage est également économiquement moins intéressant : on paie pour se débarrasser des déchets verts alors qu’on vend le bio-gaz issu de la méthanisation.
La méthanisation de tous nos bio-déchets est donc la solution d’avenir car, sur le plan environnemental et social, elle s’inscrit dans la lutte contre le réchauffement climatique, pour une meilleure qualité de l’air et donc une meilleure santé publique.
Ce que je veux souligner, c’est que la question première en termes de développement durable, c’est moins de savoir si on doit ou pas ramasser tout ou partie des déchets verts que de savoir comment seront traités et valorisés ces déchets. Le choix des modalités de la collecte est en effet conditionné par le mode de valorisation.
Si l’on choisit une valorisation par méthanisation, le regroupement de la collecte de ces deux types de bio-déchets est techniquement souhaitable. La méthanisation, pour être efficiente, exige en effet de ne pas se limiter aux seuls déchets verts mais d’y associer les ordures ménagères dont les 2/3 sont putrescibles et donc méthanisables. Si l’on prend l’exemple de la métropole lilloise, les déchets ménagers sont répartis dans deux poubelles, chacune comprenant deux bacs cloisonnés, soit quatre bacs comme nous au total dont l’un reçoit bio-déchets destinés à la méthanisation : épluchures, restes de repas, produits de tonte etc…
J’ai conscience que la question des compétences puisse se poser, l’agglo étant habilitée pour la collecte et le tri et le SMIAA pour le traitement mais l’agglo peut aussi négocier avec le SMIAA (dont elle est adhérente) ou encore s’appuyer sur notre compétence « développement économique » ou « environnement » pour développer un projet de méthanisation.
Notre agglomération doit se mettre au diapason du développement durable et inscrire celui-ci dans une stratégie de développement territorial. Pourquoi ne pas soumettre cette proposition pour avis au Conseil de Développement ou d’en débattre dans le cadre d’un forum participatif citoyen et l’inscrire ensuite dans le projet de territoire ?
Je pressens l’argument de la posture frileuse : Si nous soustrayons les ordures ménagères au CVE (incinérateur), celui-ci devra aller chercher des déchets ailleurs. Outre que cette remarque illustre une nouvelle fois l’imprévoyance des élus qui ont eu des responsabilités dans l’organisation de ce territoire (et dont certains sont toujours aux postes de commande), elle révèle effectivement que nous sommes, dans une telle hypothèse, en surcapacité au niveau de l’incinération.
Cette surcapacité est dénoncée de manière récurrente par un collectif d’associations : le Centre national d’information indépendante sur les déchets (Cniid) / Global Alliance for Incinerator Alternatives (GAIA) / France Libertés - Fondation Danielle Mitterrand / France Nature Environnement /Les Amis de la Terre /Réseau Action Climat – France
Une telle surcapacité compromet les objectifs définis dans la Feuille de route pour une Europe efficace dans l’utilisation des ressources, laquelle plaide en faveur d’une priorité accordée à la réduction des déchets, au réemploi et au recyclage ;
Pour la Fondation Danielle Mitterrand, l’application de "solutions" techniques et industrielles ne répond en rien aux préoccupations sociétales et environnementales". Pour France Nature Environnement (FNE), "le fait que les incinérateurs soient des aspirateurs à déchets qui nuisent à la prévention et au recyclage n’est pas une lubie d’écologistes. Le rapport de la Cour des Comptes de septembre 2011 montre bien que leur surdimensionnement crée un appel d’air pour les déchets, y compris les déchets recyclables.
Le premier déchet vert, c’est l’herbe. L’herbe, c’est le blason de la Sambre-Avesnois, sa première spécificité et une de ses plus grandes richesses. Faisons en sorte qu’elle soit aussi le symbole d’un territoire qui se donne l’exigence de l’excellence environnementale.
Un rapide calcul permet d'espérer un gain de 2 600 000 e par an : 24 700 tonnes d'ordures ménagères putrescibles + 3700 tonnes de déchets verts, cela donne 28 000 tonnes qui produiront 16 000 mégawatts et 723 000 euros de vente de bio-gaz, à quoi il faut ajouter les 1 900 000 euros d'économies pour les 24700 tonnes qui n'iront plus à l'incinération.
Total du gain : 2 600 000 € par an, ce quoi se payer le coût du ramassage !
Choisir le compostage plutôt que la méthanisation, c’est un peu comme si un viticulteur champenois choisissait de transformer son raisin en confiture plutôt que de produire du champagne.
La France, faut-il le rappeler, accueille cette année le sommet pour le Climat. La région Nord-Pas-de-Calais nous invite à entrer de plain pieds dans la troisième révolution industrielle. Les exigences du développement durable imposent à l’agglomération de ne pas rester à l’écart de cette dynamique et de se doter de logiciel de raisonnement adapté aux enjeux du XXIe siècle.
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