Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog de Jean-Marie Allain

Marx s'invite à l'agglo

27 Novembre 2011 , Rédigé par Jean-Marie Allain Publié dans #LE PLURALISME POLITIQUE

Lors du dernier conseil d’agglo, mon collègue Bernard Baudoux, dans sa présentation du débat d’orientation budgétaire, faisait référence à une procédure d’expropriation et invoquait le fait que les terrains étaient passés en zone naturelle protégée pour justifier le prix que contestent les propriétaires.

Autrement dit, un terrain constructible vaut plus qu’une zone naturelle.

Certes, lui ai-je fait remarquer amicalement , mais parce que nous sommes dans une économie (celle décriée par les communistes) dans laquelle la valeur du foncier est liée sa constructibilité, c’est-à-dire  aux loyers ou à la rente que le propriétaire peut en tirer.

Mais devons-nous accepter ce mode de raisonnement dont on sait qu’il mène à la destruction de la biodiversité et, par exemple, de la forêt amazonienne ?

Certains vont se demander si je ne suis pas devenu plus communiste que mon camarade Bernard Baudoux.

Non, je ne suis pas communiste mais j’en profite, lorsque les circonstances me le permettent, de porter la contradiction comme avec cet exemple sur le foncier, et de mettre mes idées en ordre sans jamais « jeter le bébé avec l’eau du bain ».

De Marx, je retiens de positif  que :

-           Juif né à Trèves dans une famille aisée, il ait su prendre ses distances à l’égard d’un milieu où l’on parlait souvent finances et gros sous,

-          Qu’il avait consenti, malgré son athéisme, à se marier à l’église luthérienne (preuve de tolérance d’une certaine manière)

-          Psychologiquement verrouillé, il confie pourtant dans ses lettres qu’il reste ébranlé par la mort de son fils, Edgar, âgé de huit ans.

-          Sa conviction que l’homme doit se dresser contre le destin et qu’il a la capacité de modifier le cours de l’histoire.

-          L’économiste qui a mis en exergue le fait que la «  force de travail » était traitée comme une marchandise sur un marché (si elle est abondante, elle tend à comprimer les salaires et inversement) et non payée à sa juste valeur pour permettre de constituer la fameuse plus-value, base de l’opposition entre la capital et le travail.

-          Son hostilité au culte de la personnalité (il a refusé le titre de Président du Conseil Général de L’Internationale et fera en sorte qu’il n’y ait pas de présidence, préférant garder le titre de secrétaire).

Mais, je retiens aussi, a contrario :

-          Que sa vision annonciatrice de l’émancipation ouvrière et du socialisme relève des certitudes des religions millénaristes…

-          La primauté qu’il accorde à la contradiction capital travail va servir de soubassement au productivisme et occulter l’autre contradiction, celle de l’industrie et de la consommation grande prédatrice de la nature, même si Marx avait pressenti dans quelques écrits cet effet pervers.

-          Sa  sous-estimation naïve de la capacité du capitalisme à rebondir sur ses échecs.

-          Une théorie de la lutte des classes qui s’inspire du darwinisme et qui, pour cette raison, justifie la supériorité de la loi de la force sur la morale

-          L’obsession de Marx (et surtout de son ami Engels) à vouloir faire du marxisme une science, et de surcroît la science sociale par excellence ( l’équivalent du darwinisme dans les sciences naturelles), dénigrant tout ce qui pouvait s’en écarter même s’il se trompe («  le communiste croit qu’il sait, le chrétien sait qu’il croit »–disait Alain Besançon, historien et ancien membre du PCF).

-          Anticapitaliste mais détenteur d’actions (comme celles que l’on peut voir dans sa maison de Londres, devenue Musée)

-          Défenseur des humbles et critique de la cellule familiale bourgeoise mais obsédé à ce que ses filles épousent des hommes argentés,

-          Il s’est par ailleurs trompé lorsqu’il pensait que le communisme ne pouvait émerger que dans les pays développés alors que c’est l’inverse qui s’est produit ;

-          Inventeur de « la dictature du prolétariat »  (Critique du programme de Gotha /1875), expression maladroite s’inspirant des expériences françaises de 1848 et 1871, pour désigner une forme temporaire d’exercice du pouvoir et à propos de laquelle son homologue italien Gramsci préféra celle, plus subtile, d’hégémonie ouvrière.

-          Matérialiste certes mais au point qu’au moment du décès de ses proches, pour discuter héritage, il finit par quitter se fâcher avec sa famille et n’ira pas à l’enterrement de son père, ni à celui de sa mère.

-          En bourgeois imbu de ses valeurs, il est incapable d’établir des rapports aux autres sans logique d’arrogance et de domination et traite souvent les ouvriers d’imbéciles dans sa correspondance avec Engels.

 

Maillon essentiel dans la longue histoire du communisme (née plusieurs siècles avant lui), Marx aura été, au final, un philosophe brillant mais compliqué, dont les contradictions valent largement celles qu’il discerne dans le capitalisme. Bref, un prédicateur qui fait l’éloge de l’eau mais boirait lui-même du vin.                                                                                                          

 Le marxisme donne pourtant des outils conceptuels indéniables pour comprendre le monde.

Ceux qui  s’entêtent à l’ignorer sont aussi stupides et sectaires que ceux qui pensent qu’il n’y a pas d’autres cadres d’analyse en dehors de lui.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :