Le spécialiste financier et la grenouille
Le spécialiste en finances locales qui dresse, dans la presse locale et de manière anonyme, un tableau louangeur des finances de l’agglomération, n’est pas convaincant, c’est le moins qu’on puisse dire.
Son témoignage est tellement peu objectif qu’il en perd tout intérêt et prête même au ridicule.
En investissement, ils ont fait le choix d’un programme ambitieux, au regard du rattrapage nécessaire en matière de taux d’équipement, pour maintenir une activité économique et agir sur le taux de chômage, pour maintenir la population et éviter un exode, compte tenu du manque d’attractivité et d’image du Maubeugeois. Pour toutes ces raisons, les élus ont engagé l’agglomération dans une démarche dynamique.
Ces affirmations ne sont étayées par aucune donnée.
De quel équipement parle notre éminence grise ? Quel est le taux de référence ?
Il laisse entendre qu’on engage des investissements d’infrastructure pour faire baisser le taux de chômage ! Avec ce type de raisonnement, on fait trois contournements autour de Maubeuge et on construit trois centres aquatiques.
L’expert fantôme ne se pose pas la question des raisons qui font qu’un territoire est attractif, si ce n’est en multipliant les équipements….quitte à ce qu’ils fonctionnent à 20 % de leur capacité !
Et comme les sottises volent toujours en escadrille, il continue :
Cette politique a évidemment un coût. Il se traduit sur la capacité de désendettement dont le niveau atteint douze ans. Ce ratio est effectivement élevé, mais il traduit les mesures ambitieuses mises en œuvre. (…)
L’ambition n’a pas de prix voyons !
Notre spécialiste n’habite probablement pas le territoire et justifie les pulsions dépensières et le niveau d’endettement par l’ambition.
Il me fait penser à un cadre qui se serait endetté jusqu’au coup en objets ostentatoires et qui justifierait son insouciance par son ambition de paraître pour rester dans le club des gagnants.
Avec ce corollaire que les effets ne seront visibles que dans quelques années, alors que la capacité de désendettement soulignée par la CRC se fige au moment de l’analyse. »
En d’autres termes, pas de panique, le désendettement est en marche… à condition de ne plus faire de gros investissements, ce que paraît osé tant il est vrai que des besoins peuvent apparaître dans les années qui viennent.
« Sur le soutien aux communes, je dirais qu’elles ont eu la chance d’avoir eu des élus communautaires soucieux de l’état des finances des communes membres, en impactant au minimum le transfert des compétences. »
L’homme invisible oublie cependant de préciser que cette préoccupation n’a concerné que les grosses communes (pour les piscines et la gare numérique), renforçant l’inégalité de traitement entre communes et creusant un peu plus les inégalités, ce que souligne parfaitement la Chambre Régionale des Comptes.
« Sur la masse salariale, la CRC pointe une forte hausse. C’est vrai dans l’absolu. Cela s’explique par la prise de compétences budgétivores comme la voirie, l’assainissement, le SDIS et les piscines.
Il affirme ainsi que le budget voirie est « budgétivore ».
Pourtant, c’est bien l’argument inverse qui a été avancé pour justifier le transfert de compétence : « transférez et cela coûtera moins cher ! ».
Il oublie également de préciser que le transfert de personnel s’accompagne d’un alignement par le haut des conditions de travail. Et quand on connait la générosité de certaines communes à l’égard des primes et des congés, cela plombe l’addition finale.
Résultat : la voirie coûte trois millions d’euros en plus que prévu par an.
Néanmoins, il s’agit de compétences à forte valeur ajoutée de services au public, ce qui est là aussi un vrai choix politique que je n’ai pas à commenter.
Sauf que le faucardage des fossés a été diminué par trois et que pour le reste, si cela fonctionne, on cherche encore la valeur ajoutée par rapport à ce que se faisait antérieurement.
A contrario, sur la masse salariale, l’analyse relative montre que le taux de 20 % du fonctionnement est faible, en dessous de la masse salariale dans d’autres agglos. D’où la nécessité d’opérer une analyse financière relative et non absolue.
Au moins sur ce point on est d’accord.
On ne peut comparer qu’en fonction du même niveau de compétence et encore. A niveau de compétence équivalent, le caractère rural ou urbain peut fortement influer sur les charges.
Enfin, les communautés d’agglos exercent des compétences parfois complexes comme la politique de la ville, la gestion des aides à la pierre, l’expertise en finances… Pour ces raisons, elles doivent se doter d’une ingénierie de qualité et compétente qui a un certain prix ! »
On hallucine !
L’expertise financière est inexistante à l’agglo, il n’y a aucun contrôleur de gestion et toutes les analyses financières sont sous-traitées à des cabinets.
Notre analyste, qui lui au moins a le sens de la responsabilité alimentaire, se positionne !
Mais alors, j’entends déjà des sarcasmes : « pourquoi ne pas avoir quitté le bateau plus tôt ? »
L’allégorie de la grenouille donne des éléments de réponse à cette question, somme toute pertinente.
Imaginez une marmite remplie d’eau froide dans laquelle nage tranquillement une grenouille. Le feu est allumé sous la marmite, l’eau chauffe doucement, devient tiède. La grenouille trouve cela plutôt agréable et continue à nager.
Puis, l’eau devient vraiment chaude. La grenouille commence à trouver cela désagréable mais elle s’est affaiblie, supporte dans une semi-léthargie et meurt à petit feu.
Mais si la même grenouille avait été plongée directement dans une marmite à 50 degrés, elle aurait donné le coup de patte adéquat qui l’aurait éjectée sitôt de la marmite.