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Le blog de Jean-Marie Allain

Coulées de boue, crise du lait :L'Europe s'invite dans le bocage

31 Mai 2009 , Rédigé par Jean-Marie Allain Publié dans #ECOLOGIE - DVLPT DURABLE

 Pour mémoire,
La surface en herbe régresse de 10 % tous les dix ans !
Pour ces vingt dernières années, cela représente plus de 30 000 hectares de
prairies dans l¹arrondissement.
La corrélation avec les coulées de boues est une évidence
Ce qui est moins évident , c¹est que les prairies sont normalement protégées
et que leur raréfaction n¹a pas n¹empêché pas la crise du lait.
Pour comprendre ce double paradoxe, il faut revenir à deux décisions
européennes, 1984 et 2003.

1°) Le régime des quotas laitiers (L¹UE comme outil de régulation
économique)
Mis en place à partir de 1984 pour stabiliser la production laitière et
éviter la chute des cours, les quotas ont contribué à orienter l¹agriculture
vers d¹autres productions, notamment céréalières.
En avesnois, c¹est 1500 hectares de prairies qui seront retournés chaque
année (et quand on retourne les prairies,souvent on arrache en même temps
les haies) au profit de la culture céréalière, grosse consommatrice
d¹engrais.
On connaît les effets de cette agriculture productiviste qui a fini par
poser de graves problèmes environnementaux comme celui de la pollution de
l¹eau par les nitrates.
L¹Avesnois, dont les ressources en eau sont importantes et de bonne qualité,
n¹a pas échappé à cette augmentation des nitrates sur certains captages.

D¹où la directive européenne du 12 décembre 1991 qui demande aux Etats
membres de fixer, là où les ressources en eau sont de qualité, des règles de
bonne pratique agricole, en particulier le maintien d'une quantité minimale
de couverture végétale pour éviter la pollution des eaux par les nitrates.
On voit que ce point , que l¹UE est aussi un outil de régulation
environnementale et nous allons voir que cette directive a une incidence
capitale sur notre territoire.

2°) La réforme de 2003 (l¹UE comme outil de régulation sociale)
La réforme de 2003 a découplé l¹aide européenne du volume produit.
Cette réforme partait d¹un souci équitable puisqu¹elle visait à ne pas
avantager les gros producteurs par rapport aux petits.
Mais elle a contribué, malgré l¹augmentation des quotas, à une chute de la
production puisque l¹agriculteur était sûr de percevoir les aides quel que
soit le volume produit.
Or, cette chute de la production laitière a donné lieu elle aussi à des
cultures de remplacement au détriment de la prairie.
De ce fait, s¹appuyant sur la directive européenne sur les nitrates de
décembre 1991, un arrêté préfectoral du 28 juillet 2004 interdit le
retournement des prairies de plus de cinq ans (sauf
dans le cas de la régénération des prairies en place).

Régénération ? Si un agriculteur veut retourner une prairie de plus de
cinq ans, il doit obtenir avant le 30 janvier une autorisation de la
Direction Départementale de l¹Agriculture qui imposera de compenser par
une mise en prairie d¹une surface équivalente.

Le retournement de prairie non autorisée doit être signalé par les élus et
les citoyens qui en ont connaissance auprès du service de la police de
l¹eau de Lambersart (ONEMA), seul habilité à verbaliser (contravention de
5e classe pouvant aller jusqu¹à 1500 euros d¹amende et à la remise en état
de la prairie.. .sans oublier la suppression de la prime reçue au titre de
la PAC).

Or, il faut bien se rendre à l¹évidence.
Ce texte (directement inspiré de la législation européenne sur les nitrates)
n¹est pas suffisamment connu, en particulier dans les communes non membres
du PNR.
Et quand il est connu, il faut avoir l¹information (quid d¹un observatoire
local de l¹Environnement ?) et le courage de s¹en servirŠ
En complément de cet arrêté préfectoral, les communes ont toujours la
possibilité de protéger les haies dans les PLU (article L123-1.7 du Code de
l¹Urbanisme), ce qu¹elles font de plus en plus mais ce qui n¹a d¹intérêt que
si le maire verbalise quand il y a arrachage.
On a donc laissé faire sans réagir (on a même souvent été jusqu¹à laisser
labourer les chemins ruraux) au point de voir apparaître des labours un peu partout
y compris sur des sites où la topographie présentait un risque.
L¹autre incidence de cette réforme de 2003, découplant l¹aide du volume
produit, c¹est que la production française, à partir de 2004, est devenue
insuffisante pour satisfaire les besoins.
Cette chute de la production laitière française a favorisé l¹inondation du
marché par le lait à bas prix d¹importation (Nouvelle Zélande),
Ce qui permet à La Fédération des coopératives et industries laitières
d¹affirmer qu¹il y a trop de lait et que les producteurs doivent ajuster
leur production pour éviter la plongée des prix.
Le problème, c¹est qu¹il n¹y a pas trop de lait en France, ni même en Europe
mais sur le marché mondialŠ au point que l¹Union européenne a réintroduit en
janvier une aide à l¹exportation des produits laitiers, accentuant de ce
fait l¹excédent d¹offre et la baisse des prix.

Devant cette situation, seule l¹Europe est en mesure de mettre en place des
mécanismes de régulation du marché, notamment :
- par le maintien des quotas dont l¹abandon est programmé théoriquement pour
2015 (et dont les agriculteurs avaient refusé la mise en place initiale)
- et la fixation d¹un prix minimum aux laiteries.

Ces mécanismes vont certes aujourd¹hui à l¹ encontre des engagements
européens pris devant l¹OMC mais l¹Europe doit faire entendre sa voix pour
ne pas entériner la dérégulation mondiale qui, dans tous les domaines, amène
à des catastrophes.

Pour maintenir des quotas :
- sans favoriser la production laitière productiviste (on nourrit le bétail
avec des céréales plutôt qu¹avec de l¹herbe avec un bilan carbone
calamiteux)
- et sans favoriser, au-delà du quota, la mise en culture et donc la
débocagisation

l¹Europe doit renforcer les mesures agro-environnementales
C¹est-à-dire :
Sur le premier point,
- s¹engager dans la prime à l¹herbe mais cette prime, initiée par la PAC en
1985, a subi le contrecoup de la baisse des crédits européens du
développement rural et repose aujourd¹hui sur le seul financement Etat.
Il importe que l¹Europe co-finance ce dispositif pour rendre les primes
encore plus attractives

Sur le second point, les terres excédentaires peuvent trouver une vocation
écologique favorable à la protection et à la diversité des espèces :
- boisement (on développe une énergie renouvelable)
- vergers, prairies fleuries

Plutôt que de transformer les agriculteurs en assistés sociaux (100 000
euros d¹aide annuelle en moyenne par exploitation)
L¹Europe doit les aider à remplir cette belle et noble mission de jardinier
de la nature.
Elle y contribue de manière marginale aujourd¹ hui.
Elle pourrait le faire d¹une façon plus volontariste demain si ceux qui
défendent cette conception de l¹Europe sont plus nombreux au Parlement
européen.







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